Une entorse, une douleur articulaire, une tendinite… La blessure est un classique rencontré au moins une fois dans une vie de sportif. Dans ces cas-là, le plus souvent, on souhaite poursuivre l’entraînement. Mais peut-on s’entraîner blessé ? Est-ce une bonne ou une mauvaise idée ?

Par Fred Hurlin

Il ne s’agit pas ici de vouloir faire des diagnostics dans le vide et dire que telle blessure permet de courir ou de rouler, ou encore de nager. En effet, le corps humain est complexe et selon la gravité d’une blessure, on peut et parfois on doit garder le corps actif. Mais dans certains cas, le repos complet est une nécessité.

Par exemple, l’entorse de la cheville comporte 3 stades :

Stade 1 –

Entorse bénigne

Lésion : Distension ligamentaire

Traitement : Glaçage, Drainage par massage et contention. Mobilisation manuelle puis proprioception si plus de douleur

Stade 2 –

Entorse moyenne Rupture partielle du ligament antérieur.
Lésion : Atteinte de la capsule articulaire Attelle semi-rigide
Traitement :Prise d’antalgique, Mobilisation douce, Rééducation poussée

Stade 3 –

Entorse grave

Lésion : Rupture complète du ligament antérieur.
Atteinte de la capsule articulaire

Traitement : Plâtre pendant 1,5 mois. Opération possible chez le sportif.

Il est entendu que s’entrainer avec un plâtre est impossible, mais qu’en une semaine, une reprise prudente de l’entrainement, principalement à vélo et natation, est possible pour une entorse bénigne.
Mais votre référent médical vous demandera peut-être un arrêt complet pour une entorse de stade 1 parce que vos articulations sont très laxes et qu’il s’agit d’une récidive d’entorse (très fréquente chez la femme notamment).
Votre médecin, votre kinésithérapeute sont des spécialistes du corps humain. Parfois ils ne sont pas très au fait de votre degré d’implication dans le sport, mais ils sont vos anges gardiens afin d’éviter une aggravation de la blessure, et parfois l’apparition de séquelles sur une longue durée.

s'entraîner blessé

Gardez en tête que :
– 1 semaine sans entrainement ne fait pas régresser.
– 2 semaines sans entrainement fait baisser de 10 à 20% les performances cardio-vasculaires.
– 3 semaines d’immobilisation complète génèrent 50% de pertes de force.

En définitive, un arrêt de 7 jours n’a pas d’impact mais si vous allez à l’encontre des prescriptions médicales et que votre blessure s’aggrave, les dégâts sur la condition physique peuvent être déplorables.

Un travail d’équipe

Si votre référent médical vous prescrit un arrêt de l’entrainement, il est toujours possible de réfléchir conjointement à des aménagements pour maintenir un minimum d’entretien physique, voire de réels entrainements. Si vous ne pouvez pas nager, vous pouvez peut-être courir et rouler. Si vous ne pouvez pas rouler, vous pouvez peut-être courir et nager. Si vous ne pouvez pas courir, vous pouvez peut-être nager et rouler. Et même, parmi ces 3 possibilités, si vous êtes entourés d’entraineurs compétents avec une sensibilité marquée pour la rééducation, il est aussi possible d’aménager une pratique interdite :
– Vous ne pouvez pas nager le crawl, mais il reste 2 autres nages (en général, si le crawl est interdit, le papillon l’est aussi).
– Vous ne pouvez pas rouler en extérieur, mais il reste le home-trainer (notamment à la suite d’une entorse de la cheville pour pouvoir déchausser avec précaution).
– Vous ne pouvez pas courir sur le bitume, mais courir sur herbe ou en aqua-jogging est possible.

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A chaque cas, pris de manière individuelle, il existe une réponse élaborée de manière collective pour trouver et définir les limites à ne pas dépasser (volume, intensité, ressentit de douleur) et les aménagements possibles. Le triathlon est un sport individuel qui doit se pratiquer en équipe.

Un arrêt médical n’est jamais du temps perdu

Il va de soi que pour un objectif à une date qui ne bougera pas, un arrêt médical complet est du temps perdu. Ce sont des séances en moins pour optimiser la condition physique : vous n’avancez plus et la ligne d’arrivée est toujours aussi éloignée. Il faut donc éviter cette option si votre état physique le permet. Cependant, des limitations médicales sur certains exercices ne sont pas du temps perdu car vous poursuivez votre marche en avant vers la ligne d’arrivée. Par une voie différente, peut-être un peu plus lente, mais vous avancez. Le temps dégagé par l’impossibilité de pratiquer 1 des 3 sports doit être investie pour optimiser des secteurs de la performance qu’on relègue au second plan habituellement. Lorsqu’un sportif que j’accompagne rencontre une telle situation, nous réalisons rapidement un bilan pour établir les nouveaux axes de travail :
– Positionnement sur le vélo et entretien général,
– Préparation physique,
– Mobilité et étirement,
– La pratique d’autres nages pour acquérir de nouveaux appuis….

La liste est longue, et donc ce temps ne sera pas perdu. Il permettra d’acquérir des compétences auxquelles vous n’auriez pas accordé de temps auparavant.
Nous devons prioriser nos actions et lorsque nous avons parfois 3-4 vies dans une seule journée, nous mettons certains choses de côté naturellement.

C’est aussi un moyen de rester engagé dans un projet sportif important dans la vie du triathlète. On parle souvent de bigorexie, d’addiction à la pratique sportive : en grossissant à peine le trait, on peut imaginer l’état d’esprit d’une personne avec des conduites addictives si on la coupait de ses drogues. L’activité physique peut avoir l’effet d’une drogue chez le pratiquant très investi et il est nécessaire d’entretenir un « minimum syndical » pour le bien-être mental malgré la blessure.
C’est tout le sens du propos de cet article : le triathlon est un sport addictif, nécessitant de nombreuses heures de pratique pour maîtriser chaque sport. Le triathlon permet aussi d’avoir une activité sociale lors des séances d’entrainement. Il est donc important de prendre la blessure de manière constructive pour continuer à entretenir l’aspect positif de la pratique régulière et revenir plus vite, plus solide et donc plus performant.

La gestion de la blessure est un travail d’équipe : médecin, kiné, ostéopathe, entraîneur qualifié sont présents pour vous aider à avancer sereinement vers une reprise dans des conditions optimales. Sachez vous entourer pour éviter le gros pépin (prophylaxie) et sachez écouter la voie de la raison de votre entourage pour ne pas trainer des bobos sur de longues durées !

Photo de Une : Eric Plantin avec une main cassée, sur l’EmbrunMan.

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