Il y a un an, à cette même période, nous avions eu le privilège de rencontrer Vincent Luis (Sainte-Geneviève-des-Bois) dès son retour du Test Event à Rio où il s’était classé deuxième. Et avait décroché par la même occasion son billet pour Rio. Le jeune homme était apparu comme à son habitude, très détendu et souriant. Mais surtout bien déterminé à aller au bout de son projet. Celui de devenir le 18 août le premier triathlète français de l’histoire à décrocher une médaille aux JO. Une question de jours désormais ?

Calme, un air posé, jamais un mot plus haut que l’autre. Vincent Luis donne toujours cette image lorsque vous le croisez à n’importe quelle période de la saison. Mais le garçon de Noidans-lès-Vesoul – une petite commune de 2 000 habitants en Haute-Saône où il a grandi – cache sous son calme et sa tranquillité une force de caractère impressionnante. En quatre ans, l’ancien champion du monde junior a réussi à passer du statut d’espoir du triathlon français à celui de prétendant au titre olympique. A tel point qu’un reportage « Intérieur Sport » lui a même été consacré en début d’année pour mettre en lumière sa préparation et ses ambitions à quelques mois des Jeux de Rio (à voir ou revoir ici). 11e des JO 2012, 10e mondial en 2013, 6e en 2014 et 3e en 2015, Vincent a réussi à se faire durant cette olympiade sa place parmi le gratin mondial. Comme il l’avait imaginé. « L’objectif est de devenir un jour le numéro un mondial. Je me suis donc fixé des étapes pour y arriver. Ça passe par un top 5 mondial en faisant un podium sur une WTS, l’année d’après un top 3 mondial en gagnant une WTS et puis, logiquement, ça va déboucher sur une médaille olympique », expliquait-il cet hiver.

L’été dernier, lors du Test Event de Rio qui permettait aux triathlètes de pouvoir se tester sur le futur parcours des Jeux, il avait lancé ce jour-là un signal fort à ses adversaires. Dans la touffeur de la plage de Copacabana, le triathlète de Sainte-Geneviève-des-Bois avait gagné son billet pour les JO en terminant à la deuxième place de la course derrière le champion du monde en titre, l’Espagnol Javier Gomez. Un résultat qui confirmait son avènement au sommet de la hiérarchie après son succès, un mois plus tôt, sur la WTS de Hambourg (Allemagne), une première dans l’histoire du triathlon français. « Une vraie joie car ça faisait un petit moment que je tournais autour. » A 27 ans, Vincent tire profit aujourd’hui de ses progrès en course à pied. Excellent nageur et bon cycliste, il avait encore du mal récemment à finir ses courses. Pour pallier ses lacunes à pied, il s’est attaché les services de Farouk Madaci, l’ancien coach de Mahiedine Mekhissi, vice-champion olympique sur 3 000 m steeple en 2008 et 2012.

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Ses partenaires d’entraînement à Reims sont donc spécialistes de demi-fond et de fond. « Ça court vraiment vite et il y a surtout une superbe émulation, ajoute celui qui s’entraîne trente à trente-cinq heures par semaine. Il n’y a pas de concurrence entre nous. Avec eux, je n’ai rien à prouver. Et je suis loin d’être le chef de groupe. Au contraire, j’apprends quotidiennement des choses à leur contact. » Un fonctionnement qu’il a mis en place après sa onzième place aux Jeux de Londres. Bien décidé à se donner tous les moyens pour passer un cap. « C’est ce qui me fallait, confirme-t-il. L’athlète doit être au centre du projet. C’est à lui de décider de qui il veut être entouré et non l’inverse. J’ai donc choisi mes entraîneurs, les athlètes que je voulais pour m’accompagner sur les séances et, également, les heures pour aller nager, rouler ou courir. Je pense qu’il ne faut pas chercher à rester à tout prix dans le microcosme du triathlon. »

En natation, il suit les conseils de Maxime Hutteau et partage quasiment au quotidien ses séances avec les jeunes triathlètes du centre d’entraînement régional au CREPS de Reims. Côté vélo, Vincent est servi avec toutes les routes quasi-désertes dans la campagne champenoise où il habite désormais (à Chenay précisément). Désireux de sortir des sentiers battus qui existant dans le triathlon, il a également choisi d’intégrer le cyclo-cross dans sa préparation hivernale. « Je dois faire une dizaine de courses par an. C’est une discipline vraiment complète. Ça permet de travailler notamment l’explosivité sur des efforts intensifs et assez courts. Je n’ai pas été surpris quand j’ai appris que des filles comme Lisa Norden ou Gwen Jorgensen en faisaient aussi durant l’hiver. Et puis, surtout, c’est beaucoup moins lassant que d’aller sur la route. Je pense que je suis dans le vrai dans ce que je fais à l’entraînement. » Les statistiques plaident en tout cas en sa faveur au regard de sa régularité dans ses performances depuis trois saisons (11 fois dans le top 10 dont 5 fois sur le podium lors de ses 12 dernières sorties sur le circuit WTS !). Désormais, ses adversaires le jaugent d’un œil différent.

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D’ailleurs, ce qui a peut-être changé entre le jeune homme qu’il était il y a quatre ans et celui d’aujourd’hui, c’est son état d’esprit. « Je pense que j’ai surtout pris conscience du niveau et du potentiel que j’avais à l’international. Avant, j’étais content de moi quand je terminais quatrième ou cinquième alors que, maintenant, je veux gagner. » Et cela même si les frères Brownlee, un Javier Gomez ou encore un Mario Mola sont au départ. « Il y a quelques années, j’étais avec eux jusqu’à la fin du vélo mais, après, je ne cherchais même pas à les suivre à pied. J’étais un niveau en-dessous. Désormais, je n’ai aucune crainte à aller jouer la gagne avec ces gars-là. » Cet état d’esprit de conquérant, Vincent l’a également affiché durant l’hiver où il a tenu tête aux meilleurs spécialistes des labours lors du championnat de France de cross-country au Mans (2e derrière Hassan Chahdi). « Ce qu’il a fait, c’est énorme. Les gens vont peut-être arrêter de croire que les triathlètes sont des athlètes à rabais. Certains devraient s’en inspirer », confiait après la course son coach, Farouk Madaci, aux caméras de Canal +.

Son but ultime est maintenant d’offrir à son pays la première médaille olympique dans l’histoire du triathlon. Un rêve qu’il ne peut, aujourd’hui, plus cacher. « Il y a une belle page à écrire, a conscience Luis. Un podium, ça serait bien, mais on retient surtout le nom du vainqueur aux Jeux. » Une façon simple et concise de la part de Vincent pour dire que c’est l’or qu’il visera avant tout à Rio.

Basile REGOLI – (c) ITU

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