Le dicton dit « en mai fait ce qu’il te plaît », alors pour une bande de triathlètes en préparation IronMan, cela devient évidemment une montée en puissance des heures d’entrainements. Le premier jour du mois étant un jour férié, il est donc légitime que le groupe se retrouve à 8h30 pour aller user les pneus sur une sortie d’un peu plus de 100 km. Malgré un rythme soutenu, le temps de parcours sera encore une fois rallongé par les nombreuses crevaisons qui font la particularité de ce club. Et pour bien nous rappeler que mai n’est pas juillet, la dernière heure s’effectuera sous la pluie froide de notre région parisienne. Peu importe, le moral et la volonté sont là et le groupe continue inébranlablement son programme qui le mènera jusqu’à la finish line.

Ce mois de mai sera surtout consacré au vélo et aux premières courses. Pas question de zapper les autres sports, mais des dizaines d’heures seront passées assis sur les 7,5cm² que nos destriers octroient à nos séants. Pour entamer ces « heures de selles », le club à inscrit une vingtaine des ses licenciés à une rando cycliste parcourant notre belle région avec au programme plus d’une vingtaine de châteaux à entrevoir. L’organisation propose 5 parcours différents et des départs entre 6h30 et 8h30 pour permettre à chacun de se faire plaisir. Sans compromis, nous avons choisi le parcours le plus long et un retrait des dossards vers 8h25 ! Les organisateurs semblent un peu déconfits de voir un groupe de 20 cyclistes partant en dernier sur le parcours le plus long. Cela signifie pour eux de devoir tenir les ravitaillements beaucoup plus longtemps que ce qu’ils avaient prévu. On a bien tenté de les rassurer sur le fait qu’on n’arrivera pas les derniers, les bénévoles sont sceptiques et  un peu déconvenues. Qu’importe, le groupe repère les marquages au sol et s’élance à bon rythme pour « travailler le fond ». Dès les premiers kilomètres Eddy nous laisse filer car il n’est pas à l’aise en peloton et préfère rouler seul. Les kilomètres s’entassent sur les compteurs, les bosses sont avalées, les châteaux défilent, les chambres à air neuves prennent place sur les jantes et on en profite pour tester les barres et gels nutritifs qui seront distribués à Nice. On commence à rejoindre certains participants que l’on double comme un TGV passant un train Corail. Néanmoins, le train Corail reste à porter de roues, profitant de nos arrêts « j’apprends à changer ma roue en moins de 10 minutes ».

Après 4 heures de route, les soleil pointe son nez ainsi que le ravito de mi-parcours. Cette « Ronde des Châteaux » est parfaitement organisée avec un fléchage parfait et un déjeuner champêtre aussi copieux que convivial. Bref, le repas avalé, c’est l’heure de repartir sur la seconde partie de l’itinéraire. Pour certains, le manque de jus se fera très vite ressentir dans les premières bosses et un groupeto sera formé pour rentrer à bon port et lutter face au vent de travers qui nous accompagnera jusqu’à la fin. A l’inverse, devant, impossible de résister à l’appel d’une longue ligne droite à travers champs, véritable piste de décollage pour deux avions de chasse couchés sur les prolongateurs et tirant leur 53*11 jusqu’au dernier ravito et forçant leur compteur à afficher des vitesses encore jamais vues. On se retrouve au dernier arrêt, on recharge les bidons, croque quelques carrés chocolat et une demi banane et on se lance pour la fin du parcours. Dès les premiers kilomètres, une longue montée explose l’équipée en plusieurs groupes. Aujourd’hui j’ai des jambes de feu et je me pousse ma vanité à son plus haut niveau et me targue de vouloir suivre les furieux. Ils me distancent à 1 km du « sommet » mais je poursuis mon effort pour limiter l’écart avec le secret espoir de ne pas être repris par mes comparses de derrière. Arrivé en haut, je ne vois personne et je me dit qu’ils doivent attendre plus loin. Je « fais la descente », les mains en bas du guidon et relance chaque fois que cela est possible. Au fur et à mesure je me rends à l’évidence, ils n’attendront pas et en effet, j’ai loupé le message « pour la fin, feu à volonté, on se retrouve à l’arrivée ». Je suis en « chasse patate » derrière le JoeBarteam qui roule en groupe et se relaie. Je me prends au jeu et j’accélère encore ma cadence. La vitesse, rattraper des participants, tout donner dans cette ultime bagarre me grisent et je me régale. Au final, j’ai énormément appris sur moi-même et sur mes capacités et certains sont même surpris de me voir arriver quelques secondes après eux après plus de 200 bornes. En quelques minutes tout le monde est là, on avale les sandwichs offerts et on pose pour la photo souvenir de notre première sortie de 230 km. Le retour à la maison se passe dans la bonne humeur, surtout grâce à Pascal qui joue aux équilibristes en pédalant fièrement avec la coupe que nous venons de remporter. Plus tard dans la soirée, Eddy le gladiateur nous enverra un mail pour nous rassurer ; il est arrivé au bout de cette sortie en un peu plus de 11 heures. En terme de force mentale, je n’ai jamais rien vu de pareil jusqu’à maintenant.

Pour nous, ce mois de mai est aussi le mois de la colonie de vacances. Pour faire plus sérieux et faire passer la pilule à notre entourage, on a expliqué que nous partions en stage dans le sud de la France sur les routes de notre défi pour repérer le parcours et multiplier les séances. Mais en réalité, quand vous laissez une dizaine de triathlètes dans un château au bord de mer, loin du boulot et des préoccupations quotidiennes, le programme est assez simple : p’tit déj copieux, vélo, pâtes, course à pied, natation, pâtes, débrief de la journée et couché tôt. Tout cela sous le soleil et dans une ambiance de mecs qui se retrouvent entre eux et se chambrent à longueur de temps. Le soir autour d’un verre, chacun se dévoile un peu laissant apparaître l’homme qui se cache derrière le sportif. Carrière, famille, hobby, origines on apprend à se connaître autrement et on réalise sans surprise que le bonhomme en pantalon est tout aussi intéressant que l’athlète en cuissard. Dans ces conditions les liens se resserrent démontrant encore une fois que le triathlon est un sport individuel qui se travaille en groupe.

Cette semaine passée sur les terres de notre défi nous apprend pas mal de choses sur l’IM de Nice :
•    le voyage en train avec tout l’équipement est une galère
•    on va en prendre plein les yeux
•    la Méditerranée n’a pas bon goût
•    la chaleur va être une contrainte importante à gérer et l’hydratation sera un facteur clé de cette journée
•    « les Contamines » ne se sous-estiment pas et le col de l’Ecre représente une sacrée bosse pour des parisiens.
•    pour sûr, on reviendra au Chateau d’Agecroft tellement l’accueil est chaleureux et l’emplacement onirique.

Au total, les plus « gourmands » auront avalé  700km en vélo en moyenne montagne (7000m de D+), 50 km à pied et 6,5 km de nage en mer durant cette semaine pour enchaîner le dimanche sur une compétition. A deux, nous partirons directement à Aix en Provence pour prendre le départ de l’IM 70.3, les autres rentreront sur leur territoire pour défendre les couleurs du TSF sur le « M » d’Enghien (95) organisé par le club voisin du VMT (Vallée de Montmorency Triathlon). Cette année, notre club ne repartira pas avec la coupe du club le plus représenté et Jacques perdra son titre de champion départemental mais la razzia des coupes sera historique avec 5 titres et surtout des temps améliorés pour la quasi totalité des licenciés du club.

Le mois s’écoule et la récupération ne semble pas encore être à l’heure du jour. Alors que certains partent à leur tour au Château de Mandelieu pour leur stage, une partie des « Niçois » prend la route pour participer au half IronMan de Vendôme. Je pensais naïvement que la fatigue de ces heures d’entrainements cumulées allait affecter nos athlètes mais pas du tout. Au contraire, les temps de course sont bluffants et Aurèl s’offre même une 15ème place au scratch en 4H45. S’il espérait passer la ligne avec sa petite puce, ce sera partie remise car sa famille ne l’attendait pas aussi tôt et patientait à l’abri sous une tente pendant que notre ancien joueur de hautbois sprintait sur le dernier kilomètre. Malgré la météo automnale et une envie de rentrer au plus vite, il prendra le temps pour encourager Diana  et trouvera les mots qui la motiveront à ne pas lâcher pour terminer sa course si durement préparée. Ce sera chose faite en 7h24 d’efforts et de douleurs…bravo les artistes !

Voilà 5 mois que l’entrainement à commencé et et je rédige mon dernier article ; le prochain sera le « compte rendu » de cette course tant attendue et préparée. Les résultats et le chiffres me donnent le tournis. Débutant en triathlon, je ne me pensais pas capable d’une telle abnégation au niveau sportif. 5 mois et 8 kg perdus, les pantalons glissent sur mes hanches. 5 mois ou 210 heures de sport réparties en 3000 km de vélo, 650 de course et 60 de natation. 5 mois déjà que ma famille me soutient, me pousse, me motive, me rassure au quotidien pour m’aider à aller au bout.

Quoiqu’il se passe ce dimanche 29 juin, j’ai déjà eu ma victoire en réalisant plus que je n’avais jamais fait auparavant, en montrant l’exemple à mes enfants que l’impossible n’est pas une limite mais simplement un objectif comme les autres… juste un peu plus haut. Ce stage, la sortie de 200 km, le 70.3, les discussions avec les potes expérimentés et le travail assidu m’ont offert une confiance qui se refusait à moi jusqu’à présent. Les rookies du groupe des « Niçois » continuent d’appréhender ce qui les attend ce fameux dimanche, mais si le doute n’a pas disparu, il ne nous contrôle plus car on à conscience que nous possédons ce qu’il faut pour rapporter cette médaille de finisher qui, peu importe sa valeur, brillera comme le plus beau des trésors. »

Fabrice Emmonet

 

Episodes précédents :

Mois d’avril

Mois de mars

Mois de février

Mois de janvier

Mois de décembre

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