Rentrée réussie sur le circuit international pour Vincent Luis qui est monté, vendredi dernier, sur la troisième marche du podium à Abu Dhabi (Emirats arabes unis) comme cela avait déjà été le cas l’an passé. Débarrassé de ses pépins physiques, le triathlète de 28 ans entend jouer à fond le classement du circuit championnat du monde et se mêler à la lutte pour les premières places. Sa prochaine sortie en compétition est prévue ce dimanche… au championnat de France de cross, à Plouay (Morbihan). Sans ambitions particulières si ce n’est celle de pouvoir se jauger en course à pied à la sortie de l’hiver avant d’attaquer un cycle d’entraînement avec davantage de séances spécifiques. Entretien. 

Quel est votre sentiment après votre course de rentrée, vendredi dernier, à Abu Dhabi ?

« Je suis évidemment satisfait. Le résultat est, certes, le même que l’an dernier mais les conditions sont vraiment différentes. Ce n’est pas le même niveau de forme ni le même état d’esprit. Il y a un an, j’étais allé là-bas en commençant à avoir ma fracture de fatigue du col de fémur. Je me disais déjà que la saison allait être compliquée. Là, j’ai pu faire un bon hiver, j’ai augmenté mon kilométrage.

Quels sont les enseignements que vous tirez de cette première sortie ?

Ce qu’il y a de positif, c’est que je sors encore une fois devant (Ndlr : quatrième à la sortie de l’eau) et que j’arrive aussi à être très actif sur le vélo. J’ai eu un peu de chance de ne pas tomber contrairement à d’autres. A pied, ce n’est pas si mal que ça même si, très honnêtement, je pensais courir un peu plus vite que ça (Ndlr : il a signé le 5e temps en 14’42). Maintenant, je n’avais pas préparé spécifiquement cette course ni fait un affutage.

Vous avez posté sur les réseaux sociaux un message de quelques lignes indiquant que vous avez vite compris que « l’essentiel serait de rester sur le vélo » et que vous étiez « content de rentrer à la maison en un seul morceau ». Le parcours cyclisme était particulièrement accidenté ?

Oui, c’était une vraie patinoire ! Quand j’ai vu tomber Jonathan Brownlee, je n’étais pas super rassuré. Au bout d’un tour, j’ai compris qu’on finirait dans le top 10 si on ne tombait pas. C’est ce que j’ai dit à Léo Bergère. On a été beaucoup critiqués sur le choix de notre matériel, principalement par des gens qui sont plus des blogueurs qu’autre chose et qui manquent d’investigation. Je suis pro dans ma pratique. J’avais mis aussi des pneus pluie, des freins à disque. Et même en mettant 5 barres de pression devant, c’était très dur de rester sur son vélo.

Comment va s’articuler votre saison internationale ?

L’idée, c’est de faire les cinq courses jusqu’à Hambourg pour marquer le maximum de points. On fera ensuite le point à ce moment-là. Si je suis bien classé, je ferai l’impasse sur les deux prévues au Canada (fin juillet à Edmonton et fin août à Montréal) et j’irai en altitude durant cinq semaines pour préparer la finale à Gold Coast (16 septembre).

Vous envisagez, donc, de jouer à fond le classement mondial…

Je suis déjà monté sur le podium en 2015 et je pense que je peux légitimement viser une médaille. J’ai prouvé l’an dernier que je pouvais gagner une course quand tout le monde est présent, là je démarre la saison avec un podium. Et puis, l’hiver a été bon. La prochaine course (aux Bermudes) sera un peu particulière car il y aura beaucoup d’absents avec les Jeux du Commonwealth. Ça va être différent sans les Anglais, les Australiens, les Sud-Africains, etc.

On vous annonce au départ du championnat de France de cross prévu ce dimanche à Plouay. Vous confirmez ?

Je me suis beaucoup posé la question en début de semaine. J’ai fait un fartleck mardi et, hier, une sortie longue de 20 bornes. Je vais y aller avec l’état de fraicheur du moment mais je ne sais pas trop ce que ça va donner. On verra dimanche. Je me focalise moins sur cette course qu’auparavant. Si j’y vais, c’est que je sens que ça peut m’être bénéfique pour ma saison.

Le parcours semble être très physique, usant, avec beaucoup de relances. Quel rôle pensez-vous pouvoir jouer sur cette course ?

Ça va plutôt m’avantager. Quand on court dix bornes sur un circuit roulant, c’est compliqué de suivre surtout quand, devant, ça va à vingt à l’heure. Là, le musculaire va prendre le dessus sur le physio. Les niveaux vont être nivelés donc il ne faut pas se laisser impressionner par les références sur piste qu’ont certains et jouer sa chance à fond. Il faudra être malin. En tout cas, je suis content que ça se fasse en Bretagne sur un vrai parcours de cross. Ça promet du beau spectacle.

Depuis un an, Mahiedine Mekhissi-Benabbad et vous partagez les séances d’entraînement en course à pied. De quel apport est-il pour vous au quotidien ?

C’est un mec qui a le plus beau palmarès du demi-fond français avec trois médailles olympiques tout de même. Il est très humble, parle peu mais bien. C’est un puit de savoir. Ça, c’est pour l’homme. En tant qu’athlète, c’est quelqu’un qui a un mental incroyable. Je n’ai jamais vu ça. Je fais des séances avec lui tous les jours. Quand tu crois parfois que tu es en train de le faire souffrir, tu te rends très vite compte qu’il n’est pas à sa limite et c’est lui qui finit par te faire mal. Après voilà, le temps que je dois valoir sur 3 000 mètres, c’est ce que lui fait avec 35 barrières. C’est un plaisir en tout cas de s’entraîner avec lui, même si c’est 99 % du temps de la souffrance. Et je peux vous dire qu’on est très chanceux qu’il ne soit pas au départ de la course dimanche car sinon on courrait tous pour la deuxième place.

Il se murmure que vous aimeriez courir un 10 000 m sur piste au printemps. Où en est ce projet ?

On a un grand tableau dans le bureau avec la liste de tous les 10 000 m possibles au calendrier et on fera un choix par rapport aux triathlons. Il faut bien cibler la date pour en faire un au bon moment car ça reste tout de même une course de 28 ou 29 minutes à fond.

Le championnat de France de la discipline est au programme le 14 avril. Est-ce une date qui pourrait convenir pour un premier test ?

Ça figure parmi les courses envisageables mais ça semble compliqué avec le calendrier en triathlon car il y a juste derrière les Bermudes et Yokohama. Par contre, une semaine après le Japon, il y a la Coupe d’Europe en Angleterre avec des courses pour tous les niveaux. Ça s’appelle la nuit du 10 000 m. La date est plutôt pas mal donc c’est possible qu’on aille là-bas. J’ai envie d’y aller pour faire un chrono tout en étant réaliste sur mes capacités. Je ne vais pas m’aligner dans une course avec des gars en 28’00.

Qu’est-ce qui vous motive à tenter l’expérience de la piste ?

Je pense pouvoir prendre du plaisir à faire ça. Le fait de voir mes partenaires d’entraînement en faire, de ne pas être loin de les accrocher, ça me donne envie d’essayer. Maintenant, comme je l’ai déjà dit, je sais que je peux viser une médaille mondiale ou olympique en triathlon, autant c’est utopique en athlétisme. J’ai ma carrière de triathlète, c’est ce qui me permet de remplir mon frigo. »

Propos recueillis par Basile REGOLI – © ITU

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