Triathlète pro depuis seulement trois saisons, Manon Genêt est devenue l’un des porte-drapeau tricolore féminin sur le circuit Longue distance, et notamment Ironman. La Rochelaise ne cesse de progresser au fil des expériences, de se construire un palmarès élogieux, et un environnement propice à la performance. Malgré les écueils propres à sa discipline, et avec un but ultime : parvenir, à terme, à intégrer le Top10, voire Top 5, à Hawaii…

Propos recueillis par Luc Beurnaux – Photo Atripix

Manon, racontes-nous ta rencontre avec le triathlon ?

Ma première expérience en triathlon remonte à mes 18 ans. J’étais à la Rochelle, en Terminale, et je rentrais des Etats-Unis où j’avais appris quelques bases en natation et continué ma pratique de la course à pieds en cross, indoor et outdoor track. Étant issue d’une famille de marathoniens et de VTTiste, je me suis dit : « pourquoi pas enchaîner les trois sports ? ». Auparavant, j’avais fait 10 ans de gymnastique à un bon niveau national, j’avais besoin de changer. J’ai testé le triathlon par curiosité ; et j’ai vraiment accroché, mais ça n’a pas pu durer car j’ai mis la priorité sur mes études. Je suis partie en classe prépa, puis en école de commerce, et en 2012-2013, j’ai pu renouer avec le triathlon en club. Je suis partie sur du loisir, au départ. Et j’ai rencontré l’entraîneur du club, il m’a impliqué davantage dans la discipline, et en 2014, je faisais mon premier half et mon premier Ironman, à Nice.

Tu as évoqué les Etats-Unis, peux-tu nous en dire plus ?

J’ai toujours été aventurière, j’ai besoin de défis, j’ai besoin de tracer une route bien à moi, qui sorte des sentiers battus. Je voulais depuis un moment parler anglais couramment et découvrir le fameux rêve américain. Je suis alors partie à 16 ans aux Etats Unis, pour vivre dans une famille d’accueil et dans un lycée américain. J’ai appris la culture, la langue, pendant un an, à Rhode Island. Là-bas, le temps consacré aux activités extra scolaires est bien plus important qu’en France. Le lycée offrait tous les après-midi pour développer son identité. J’en ai profité pour découvrir d’autres sports : le krav maga, la boxe, la lutte, le cross, l’indoor et l’outdoor track et… puis je voulais aussi passer mon brevet de secourisme, pour pouvoir surveiller les plages en rentrant en France. Il fallait donc que j’apprenne à nager. Je l’ai fait là-bas, aux Etats-Unis. J’y ai vraiment pris goût même si je partais de zéro.

Comment s’est passée, physiquement, la transition gym/triathlon ?

Physiquement, les deux sports ne demandent pas du tout les mêmes qualités, puisque la gym est un sport d’explosivité, et que le triathlon est un sport d’endurance. Par contre, on retrouve dans les deux la pluridisciplinarité, et cette capacité à jongler d’un support à l’autre. Avec les différents agrès en gym, et les trois sports en triathlon. En gym, j’étais surtout forte en jambes, donc mes agrès de prédilection étaient plutôt le saut et le sol, et j’étais assez faible au niveau des bras, donc je n’étais pas top aux barres… Mais ce que j’ai beaucoup appris en gym et qui me sert aujourd’hui dans mon quotidien, c’est la discipline et l’assiduité. La gym, c’est assez militaire. On peut se faire mal, faire des lourdes chutes. J’ai été formée dès 7 ans à une rigueur et à une discipline très stricte, à raison de 15 h / semaine pendant 10 ans. J’ai dû apprendre à être rigoureuse, et à gérer mon temps entre sport, école, vie sociale, et c’est encore comme ça aujourd’hui.

Passer d’un sport à l’autre t’as demandé un certain temps d’adaptation ?

D’une certaine manière oui, découvrir et progresser dans un sport (ou 3) est un processus assez long. Et c’est d’autant plus vrai quand l’implication dans une pratique augmente; l’investissement et l’exigence vont de paire, donc il faut sans cesse s’adapter. Mais d’une autre manière, cela a aussi été rapide car j’ai très vite été encadrée par l’entraîneur qui me suit encore aujourd’hui. Sans sa conviction que j’avais des qualités, je pense que j’en serais restée à une pratique loisir. La gym a eu cet effet dévastateur de me faire perdre confiance en l’athlète que j’étais capable d’être. Frédéric Lureau a rapidement noté mes qualités. Etrangement, je n’étais pas très rapide ni très explosive ; je n’avais pas une VMA très haute, mais j’étais capable de courir longtemps à un haut pourcentage de ma VMA. C’est ce qui a fait « tilt », et il m’a mise assez rapidement sur du Long. Cette qualité d’endurance, c’est ma force principale. Il a fallu ensuite structurer l’entraînement et trouver le temps pour les heures qui ne cessaient d’augmenter. En natation, il y avait tout un aspect technique que je ne maîtrisais pas, je manquais de structure aussi. En vélo il fallait passer des heures à « borner », et en course à pied, il a fallu que j’apprenne à courir vite (j’apprends toujours !). De toute façon, je pense que dans ces sports, on n’a jamais vraiment fini de progresser…

Credit Nigel Roddis/Getty Images

Est-ce que tu as cravaché particulièrement dans l’une des trois disciplines ?

Si je devais en choisir qu’une seule, on va dire que je « cravache » toujours en natation. Ce n’est pas que je sois mauvaise, car je ne suis jamais vraiment loin derrière la tête de course. Mais – si en vélo je suis plutôt dans la moyenne haute, et qu’en course à pied ça devient de plus en plus intéressant – il me manque encore ce petit truc qui me permettrait d’aller accrocher le bon groupe qu’il ne faut pas lâcher pour le reste de la course. La course serait bien différente si je ne passais pas 180km à essayer de combler mon retard !

Pourquoi as-tu décidé de passer pro ?

Le sport a toujours fait partie de ma vie mais devenir athlète professionnelle n’a jamais été ne serait-ce qu’une idée. Je suis carriériste. Mais j’imaginais ma carrière dans une prestigieuse boîte ou dans une ambassade à l’étranger. Pour me donner les moyens, j’ai placé mes études en priorité. Quand j’ai pris mon poste de Responsable Marketing dans une enseigne de sport, j’arrivais à faire 10 puis 12 puis 15h/semaine d’entraînement, à concilier avec 40 heures de boulot et des déplacements… Mon rythme de vie se déséquilibrait au profit du triathlon entraînant des effets néfastes sur ma santé physique – j’ai fait une fracture de fatigue – et sur ma santé mentale. Je me suis dit qu’à 25 ans, il ne fallait pas se mettre dans des états pareils, et qu’il fallait faire un choix. J’ai pesé le pour, le contre, évalué les risques, évalué mon niveau, ma capacité à progresser et ce que ça allait demander. Je l’ai fait avec le maximum de lucidité. J’avais bien conscience que je n’étais pas surdouée et que ça allait me demander beaucoup de travail et de patience. J’ai cherché des structures d’entrainement, des personnes sur qui compter. Et puis j’ai établi un plan d’attaque. Je voulais me donner une chance pour ne rien regretter. Si ça marchait, alors j’avais tout à gagner, si ça ne marchait pas alors je n’aurais aucun regret. Malgré le risque, je savais aussi que mon bagage me permettrait de rebondir.

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